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INTÉGRER UN EMPLOYÉ COMME FUTURE RELÈVE OU ASSOCIÉ :
Un défi entrepreneurial et humain.
En matière de relève, nombre d’articles nous parlent de l’importance de faire un plan, d’étapes communes à chaque dossier, des aspects juridiques et fiscaux, etc. Mais, le plus grand défi consiste à intégrer tous ces aspects dans le contexte du vécu entrepreneurial et des personnes.
Le monde entrepreneurial et le projet
D’abord, on comprend que l’intégration d’un employé comme future relève ou associé doit s’inscrire dans le plan d’affaires de l’entrepreneur. Comme on le sait, une entreprise résulte du management de ressources qui participent à la réalisation d’activités en vue de répondre à un ou plusieurs besoins du client, et ce, dans un environnement concurrentiel et macro-économique changeant. Il est donc évident que l’entreprise doit pouvoir intégrer cette nouvelle ressource humaine dans un rôle qui contribue à l’atteinte de ses objectifs, tout en faisant face à diverses contraintes.
La disponibilité limitée de la main-d’œuvre, particulièrement celle possédant les qualités entrepreneuriales recherchées est un exemple de défis importants. Le déséquilibre momentané au sein de l’entreprise, tant financier qu’humain, alors que la nouvelle ressource doit se familiariser à l’entreprise et à son nouveau rôle, en constitue un autre.
L’absence de relève à l’interne ou le besoin d’intégrer une personne possédant des qualités complémentaires peut mener à envisager cette solution de l’embauche spécifique. Comme on le sait, en optant pour un certain modèle d’affaires, en choisissant certains équipements au lieu de certains autres, etc., l’entrepreneur met en place les éléments qui peuvent en grande partie faire le succès de son projet d’affaires. Il en est de même quant à la dotation en ressources humaines. On peut donc évaluer l’embauche comme alternative pour créer une opportunité de relève ou d’association.
Se connaître et partager une vision
Il est vrai que l’intégration d’une future relève ou d’un associé dans l'entreprise passe par la préparation d’un plan qui définit l’ensemble de la démarche. On ne peut que recommander aux parties, propriétaire et éventuel partenaire, de ne pas trop s’investir dans un projet de partenariat, ni investir financièrement, sans que celles-ci aient approfondi le projet et qu’une entente claire et écrite, couvrant toutes les étapes, soit établie.
Ceci n’empêche évidemment pas une collaboration, celle-ci consistant entre autres en une relation employeur-employé, client-sous-traitant ou autres. En fait, une relation d’affaires est même souhaitable. Elle peut faire partie de la première étape qui vise à se connaître mutuellement, ainsi qu’à permettre à l’éventuel repreneur ou associé de prendre connaissance de l’entreprise.
La prise de contact entre les acteurs doit aider à définir le projet. Les discussions portent assurément sur le processus devant mener à l’atteinte des objectifs communs et partagés. Elles ont aussi pour but de permettre d’explorer les questions inhérentes à la direction de l’entreprise et à la propriété de celle-ci (le tableau 1 présente les aspects les plus pertinents).
Définir les étapes suivantes
Trop souvent, beaucoup d’efforts et d’argent sont investis pour l’étude des questions liées à la propriété et beaucoup moins quant aux questions relatives au partage de la direction. De plus, alors qu’une acquisition par une personne externe se déroule généralement en une seule étape, il pourra y en avoir plusieurs entre l’embauche d’un nouvel employé et le transfert complet de la direction et de la propriété.
La mise en œuvre d’un plan d’intégration exige une progression où les attentes des parties sont rencontrées quant à l’avancement du partage de propriété et celui de la direction, et ce, avec certaines dates établies dans le temps (on peut parler de jalons).
Par exemple, si le repreneur s’attend à ce que les discussions aient permis de préciser le rôle de chacune des parties dans l’entreprise, ou de définir la prise de participation à la propriété, soit dans un délai de six mois, et que cela n’a été abordé que brièvement à cette date, il est fort probable que le projet finisse par être compromis.
Un projet à gérer
Pour planifier la démarche, on aura avantage à s’inspirer de la gestion de projet. On verra à s’entendre sur les objectifs du projet, les « échéanciers », les « moyens » et les « livrables ». Voici un exemple qui illustre brièvement un scénario possible :
- Intégration du releveur sur une période de six mois dans un poste clé de l’entreprise
- Pendant cette période, discussions périodiques entre le repreneur et l’entrepreneur pour mettre le plan par écrit
- Consultation et accompagnement selon les besoins
- Au préalable, on aura convenu comment chacun participe aux paiements des frais, s’il y en a
- À la fin du sixième mois :
- décision de poursuivre ou non
- arrêt définitif des étapes suivantes
- Si l’on passe à l’étape suivante :
- mise en place d’une convention d’actionnaires ou d’associés
- acquisition d’une participation minoritaire dans l’entreprise par le releveur à même ses épargnes et un prêt personnel
- Partage de la direction et de la propriété
- Selon l’échéancier prévu, décision par le releveur de faire l’acquisition du reste de l’entreprise
L’élaboration dans les détails d’un tel plan exige que les personnes impliquées soient prêtes à consacrer les efforts requis pour la planification du projet et sa mise en œuvre.
En plus de prévoir un budget pour des consultations auprès d’experts sur les questions légales et fiscales, dans plusieurs cas, on aura avantage à envisager de l’accompagnement et/ou de la formation. Ces appuis devraient faciliter l’intégration des divers aspects dans la réalisation du projet, et ce, à partir d’explications, d’outils, etc.. Par exemple, la préparation d’un plan financier incluant les prévisions, une ou des méthodes d’évaluation de la valeur de l’entreprise, les étapes d’achat et les financements envisagés, pourra grandement aider à définir la faisabilité du projet.
Pour avoir du succès, les attentes de chacune des parties doivent être réalistes alors que chacun doit voir à assurer la confiance et la communication, en plus de laisser place à la consultation. Un prix trop élevé pour l’acquisition aura tôt fait de faire fuir une éventuelle relève, tout comme un manque de leadership de la part du releveur mènera à la perte de confiance chez l’entrepreneur.
Enfin, le plan doit envisager des imprévus occasionnés par des facteurs externes à l’entreprise. On a donc avantage à prévoir certaines souplesses dans l’exécution de chacune des étapes. Par exemple, il pourra être convenu, en cas de ralentissement économique impactant négativement les ventes, que l’acquisition d’un bloc d’actions sera reportée d’un an.
Bref, plusieurs exemples vécus démontrent qu’il est possible d’intégrer un employé comme future relève ou associé, et ce, dans la mesure que l’on prenne en compte qu’il s’agit d’une démarche entrepreneuriale et humaine.
Tableau 1 – Le partage de la direction et le partage de la propriété
Aspects liés à la relève ou au partage de la direction
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Aspects liés au transfert / partage de la propriété
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La prise de connaissance de l’entreprise par l’éventuelle relève / partenaire |
La planification du transfert de propriété
- Le point de vue fiscal
- Le point de vue légal
- Le point de vue financier
- La gestion des risques
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Aspects humains :
- Pour chacun : évaluation de l’expérience, des rôles, des forces et des faiblesses,
- Validation de l’intérêt mutuel en lien avec la relève / la transition / l’association
- Définition du mode de gestion à privilégier pour l’avenir (mode plus ou moins entrepreneurial ou planificateur)
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La mise en œuvre du plan de relève de la propriété :
- L’intégration des points de vue
- La vision d’ensemble à la fixation des détails :
- Dans les délégations de pouvoir, les définitions de tâches et la gouvernance
- Dans la convention d’actionnaires
- Dans le financement
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La familiarisation avec la gestion de l’entreprise par l’éventuelle relève ou associé |
La gestion conjointe propriétaire-releveur
(incluant : formation, participation progressive aux décisions et plan de communications) |
Dans le cas d’un projet de retraite du propriétaire |
Chaque cas de relève comporte ses particularités, mais lorsqu’on compare les expériences, on note également des similitudes dans les processus et leurs constituants. Ainsi, les deux processus reconnus pourront avancer plus ou moins en parallèle, alors que chacun des éléments qu’ils comportent pourront être plus ou moins longs à réaliser. |
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